La réflexion philosophique chez Aristote part de la physique en tant que connaissance philosophique de l’être au niveau de la nature. Aristote s’efforce de saisir l’essence de la nature. Il est ainsi contraint de prendre position à l’égard de ses prédécesseurs et notamment à l’égard de la thèse parménidienne sur l’unicité de l’être. Il importe du point de vue d’Aristote de réfuter la thèse de Parménide puisque c’est ainsi seulement que la physique, en tant que science de l’être au niveau de la nature, peut être fondée. La position de Parménide supprime l’essence de la nature, puisqu’elle implique l’impossibilité du mouvement, lequel représente, selon Aristote, le caractère essential de l’être naturel. Aristote réfute la thèse de Parménide en partant de la multiplicité des significations de l’être, que revèle le discours. Aristote montre que l’être n’est pas seulement un, mais aussi multiple. Seulement si l’être naturel, peut exister. C’est à cette condition que la physique, en tant que connaissance des premiers principes et causes des êtres naturels, est possible. La nature est, selon Aristote, une espèce de cause. En tant que cause du mouvement, elle est à la fois matière et forme. Mais la forme est davantage nature que la matière, parce qu’elle remplit davantage les conditions de l’essence. Mais si la matière, aussi bien que la forme est nature, quel est l’objet de la physique? Est-ce la forme ou la matière? La physique doit connaître aussi bien la matière que la forme, mais celle-ci uniquement dans ses rapports avec la matière. Par contre la philosophie première (métaphysique) étudie la forme en tant que telle, c’est à dire l’essence pure, abstraction faite de son rapport avec la matière. Mais si la forme, aussi bien que la matière, est cause de mouvement doit être, lui même, immobile. Puisque le mouvement constitue le caractère essential de la nature, la transcende et acquiert un statut métaphysique. La réflexion sur la nature en tant que cause conduit. Aristote à transcender la nature. La nature ne constitue pas l’être. Sans la transcendance métaphysique on ne saurait pas en quoi consiste l’ «être» de l’objet physique. Cette transcendance est donc nécessaire pour fonder la physique en tant que connaissance de l’ être en tant qu’être est acte pur. Mais comment concevoir l’être en tant qu’acte pur? En s’efforcant de répondre à cette question Aristote aboutit à une seconde transcendance: C’est l’homme et non la nature qui est transcendé cette fois. L’acte pur ne peut exister que si une forme pure, c’est-à-dire une forme sans matière, existe. La forme pure ne peut exister que dans l’intellect, parce que l’intellect seul pense l’être, soit la forme, en tant que telle. Mais en pensant l’être, l’intellect se pense lui-même. Ainsi Aristote définit l’essence de l’être suprême, Dieu, qui est intellect, comme «pensée de la pensée». L’intellect humain, pense, lui aussi, l’être, mais ne le possède pas activement et d’une manière stable et durable. Il ne le saisit qu’à certains moments privilégiés. Bien que l’intelligence pense «l’éternel», elle ne trouve pas sa plénitude au niveau de l’intellect humain. L’homme doit se transcender lui-même afin de saisir la plénitude de l’intelligence au niveau de l’intellect de l’être suprême. L’intelligence donc, l’essence de l’être en tant qu’être, n’est concevable que comme transcendance. L’intelligence est la pensée de l’Être; mais il s’agit de l’intelligence en tant que transcendance.
Ακαδημία Αθηνών
